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La colonie de vacances du Parti Socialiste, le Grand Air, le jour de son inauguration

La colonie de vacances du Parti Socialiste, le Grand Air, le jour de son inauguration

Lénine (Vladimir Ilitch Oulianov) a séjourné à Pornic avec son épouse, Nadejda Kroupskaïa, ainsi que la mère de celle-ci. C'est Nadedja qui, à l’été 1010, a loué ce deux pièces de la villa Les Roses, rue Mondésir, dans le quartier de Gourmalon.

Les deux femmes avaient tout d’abord séjourné à la colonie « Le Grand-Air », propriété du Parti Socialiste Unifié, dont l'inauguration a eu lieu le 15 août 1910 en présence de la fédération socialiste nantaise. Cette année-là, Lénine n’est pas encore de le père de la Révolution qu’il ne deviendra que sept ans plus tard.

Une carte postale de 1910 représente "la colonie de vacances du Parti Socialiste" le jour de son inauguration. Acheté par le parti en 1909, ce bâtiment n'est autre que l'ancien Grand Hôtel de la Plage situé face à la plage de la Noéveillard. M. Roland, à l'origine de ce nouveau genre de vacances imprégnées de "foi socialiste et d'action coopérative" le décrit ainsi lors du discours d'inauguration :

« Le Grand-air n'est pas un caravansérail moderne où le voyageur ne prend même pas la peine de secouer au seuil ses sandales ; c'est, dans la société capitaliste, le coin modeste et déjà charmant où d'un effort commun nous avons situé la réalisation d'un rêve encore timide, du repos nécessaire et, hélas du repos marchandé par notre maître : le capital. (…) Le Grand-Air n'est pas un hôtel particulier où certains privilégiés de la classe ouvrière pourront à bon compte passer des vacances aimables. Si sa réussite ne devait s'arrêter qu'à ce dessein, qu'à cet objet, il deviendrait vite – et justement – un objet de réprobation pour les socialistes».

La fête socialiste avait peut-être pour but de montrer à leurs adversaires et aux Pornicais qu'ils avaient tort de se les représenter "comme des gens mal élevés, ennemis de la joie et de la gaieté".

Dans « Ma vie avec Lénine » son épouse relate : « Cette colonie était installée sur le littoral, non loin de la petite plage de Pornic, dans la fameuse Vendée. J'y allai avec ma mère. Mais notre vie dans la colonie ne s'arrangea pas comme il aurait fallu. Les Français menaient une vie très fermée, chaque famille se tenait à l'écart des autres, à l'égard des Russes on témoignait une certaine animosité. »

Jean Fréville dans son livre Lénine à Paris raconte : « Nadejda loua deux chambres dans la maison d'un douanier. L'endroit était des plus pittoresques. Dès la sortie de la gare, le voyageur aperçoit, encadré entre les vieux quais, le bassin où se balancent des bateaux aux voiles blanches ou ocre. A droite, la ville s'étage sur la pente d'une colline. Un château féodal dresse à l'entrée du port, ses tours à machicoulis, au dessus des frondaisons d'un parc, en bordure d'une plage. La presqu'île de Retz marque les confins de la Bretagne et de la Vendée. Basse et sablonneuse de l'embouchure de la Loire à la pointe Saint-Gildas, la côte se hérisse alors d'éperons rocheux, mordus à vif par les vagues, se découpe en échancrures et en criques où s'arrondissent entre des falaises de belles grèves, puis elle s'aplatit de nouveau au sud de Pornic, le long de la baie de Bourgneuf, face à l'île de Noirmoutier. Lénine interrogeait les pêcheurs, parcourait à bicyclette le littoral, contemplait les étendues moutonnantes du haut des promontoires tailladés par les lames, sa baignait dans la mer, s'allongeait sur le sable, respirait à pleins poumons l'odeur des pins et les effluves du large, qui balayaient les miasmes de Paris … A table, Lénine devisait gaiement avec le maître du logis et sa femme, une forte commère au verbe haut, blanchisseuse de son métier, qui ne s'en laissait pas raconter… »

C’est une autre carte postale représentant cette fois la plage de la Source où Lénine s’est baigné, et signée de sa main, qui a été remarquée par deux visiteurs nantais du musée Lénine de Moscou en 1963, dont l’un, Pierre Mahé, était ancien instituteur de Pornic. On peut y voir des enfants qui jouent, une femme en robe, ainsi que plusieurs personnes assises. Au dos, se trouve la signature de Lénine.

Le 1er août, Lénine écrit de Pornic à une autre de ses sœurs Maria qui habite en Finlande au dos d'une carte postale de Gourmalon :

« Chère Maniacha, je t'écris de Pornic. Voilà près d'une semaine que je me suis installé ici avec EV et Nadia. Nous prenons un repos merveilleux. Baignades, etc. Comment ça va, chez vous ? Et la santé de maman ? Où en est la question de Copenhague et de Stockholm ? Ecris-moi à Pornic (Loire-Inférieure). Rue Mon Désir. K. Les Roses. Mr Oulianoff. Bonjour à tous. Ton V. Ou. J'ai écrit à maman il y a une semaine, de Paris. A-t-elle reçu ma lettre ? »

Dans une carte du 24 août, Kroupskaia écrit à Anna, sœur de Lénine :

« Chère Ania, j'ai reçu et transmis ta lettre, Choukourka (Lénine) est parti dès hier, quant à maman et moi, nous avons l'intention de rester ici jusqu'à la mi-septembre. Il fait quand-même bon, ici. Je t'embrasse bien fort, ainsi que MA, si elle n'est pas encore partie. Maman envoie bien des salutations. Nadia ».

En 1912, alors que se prépare en secret le congrès de Prague qui va décider de la création du parti bolchevik, Nadiejda enverra les agents de la police secrète du tsar sur la fausse piste d’un conclave secret de l'Internationale à Pornic.

Edition Le Populaire du mercredi 10 août 1910 :

« Une inauguration à Pornic

La colonie socialiste du ‘Grand air’

C'est lundi prochain 15 août, qu'aura lieu en quelque sorte , l'inauguration officielle de l'ancien hôtel de la Plage, acheté pour le compte du Parti Socialiste Unifié, aménagé et devenu la colonie dite "du grand air".

Une excursion populaire est organisée à cette occasion, sous les auspices de la fédération socialiste nantaise.

Le départ de cette excursion aura lieu lundi prochain, à 7 heures 57 du matin, par le train spécial mis en circulation les dimanches et jours de fêtes, durant la saison balnéaire.

Le prix de la carte (comprenant le voyage, le déjeuner et le dîner), est fixé à 5 F.

Les familles qui préfèreraient apporter leur nourriture ne paieront bien entendu que le prix du voyage ; elles seront quand même reçues au"Grand air" avec les autres excursionnistes.

A l'issue du déjeuner, vraisemblablement plusieurs orateurs du PSU prendront la parole. On peut déjà citer parmi les orateurs outre les militants du parti à Nantes et à Saint Nazaire, MM Oustry, avocat ; Dubrouilh secrétaire du P.S.U. ; Lauche et Albert Thomas, deux des députés socialistes dont les récents débuts oratoires au parlement ont produit sensation.

Un concert suivra, dont le programme sera publié ultérieurement.

Dès maintenant, on peut retirer ses cartes à la Maison du Peuple rue du Chapeau Rouge ; à la bourse du travail, rue de Flandres ; ou à l'une des sociétés coopératives suivantes : l'imprimerie ouvrière ; salon de coiffure, rue Scribe ; société de consommation "la Ménagère" rue Rubens.

Le dernier délai pour recueillir les inscriptions est fixé à jeudi, il n'y a donc plus que 2 jours qui nous en sépare. »

Tag(s) : #Histoire en memoire
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